En Mai 2019, j’ai eu l’opportunité de suivre une des expéditions « La Planète Revisitée » du Museum Nationnal d’Histoire Naturel dont le but était d’inventorier les algues et invertébrés marins en plongée.
Flabelline mauve (Flabellina affinis)
Pour réaliser ces inventaires, nous nous sommes prêtés à un « jeu de mémory » des espèces rencontrées, ce qui nous a permis de mieux suivre les habitats.
Ce jeu de reconnaissance à l’oeil nue des espèces a été réalisé sur des récifs de 5 à 30 m de profondeur.
Cette méthode est souvent utilisée pour faire des évaluations rapides d’habitats (description de l’écosystème et état de santé) suivant une liste d’espèce remarquable. En biologie, cette méthode est appelée « Rapid Assessment Survey ».
On entend par espèce remarquable, une espèce sensible aux pollutions par exemple.
Ainsi, sa précence ou son absence nous informe sur l’exposition de l’écosystème aux polluants.
Avant toute plongée, une liste d’environ 250 espèces de faune et flore susceptible d’être rencontrées a été établie à partir de base de donnée nationnale existante pour la Corse.
Une fois la liste d’espèce établie, il suffit d’appliquer les mêmes règles du jeu de mémory pour tous les sites sur lesquels nous plongEons. Ce qui nous a permis par la suite de pouvoir comparer les sites entre eux :
- Deux plongeurs doivent tout d’abord faire un parcours vidéo de 100 m² sur le récif pour caractériser l’habitat physique.
- Sur le retour de ce parcours, les deux plongeurs cherchent toutes les espèces de leur pré-liste sur une plaquette immergeable. Ensuite, associent pour chaque espèce un score d’abondance de 0 à 4 (0 = absent à 4 = très abondant) durant un temps déterminé de 20 min.
- S’ensuit, un débriefing à chaud des deux plongeurs pour vérifier les observations et affiner les scores d’abondances relatives.
- Une fois les données validées, ces listes sont sauvegardées à l’aide d’un outil de gestion en ligne des données naturalistes : CardObs. Elles permettront ensuite une analyse spatiale des habitats marins rocheux prospectés.
Au-delà de l’aspect ludique de cette méthode de mémoire et chasse à vue en plongée sous-marine, l’application sous l’eau des mêmes « règles du jeu » (standardisées) rend alors possibles des comparaisons entre les sites prospectés. Ces résultats peuvent mettre en avant des environnements rocheux remarquables ou plutôt dégradés, de telles informations pourront ensuite orienter les mesures de conservation et gestion locales.
Le périmètre d’exploration de la mission inclus le plus grand parc de métropole, le Parc naturel marin du Cap Corse et de l’Agriate / Parcu naturale marinu di u Capicorsu è di l’Agriate (6830km2). Ce jeune Parc, dirigé par Maddy Cancemi, existe que depuis 2016, et son plan de gestion est en cours de rédaction.
La Planète Revisitée en Corse s’est donc déroulée à un moment important pour la montée en puissance du Parc. Le développement d’un tel protocole et les données collectées sur les habitats pourront être directement valorisées.