C’était le mois dernier, Rob et Greg partaient pour l’Islande après un passage dans nos boutiques pour s’équiper.
Rob a grandi près de Barcelone sur la côte ensoleillée, où il ne neige jamais, il se rend régulièrement dans les Pyrénées et y découvre la randonnée estivale. En prenant pour excuse la poursuite de ses études, il déménage dans les Alpes pour y vivre de « vrais hivers ». Il franchit le pas entre randonnées à la journée et raids de plus longue durée. Il organise et participe à plusieurs voyages en itinérance. Que ce soit à skis au Kyrgyzstan, en Iran ou encore en Turquie, à vélo au Tibet et aux Balkans ou bien en kayak au Lofoten et Colombie Britannique. Il apprécie de se déplacer par ses propres moyens. Organiser de tels voyages lui permet de découvrir de nouveaux endroits, mais présente également d’autres avantages comme rencontrer des gens sur place, affronter des défis logistiques et avoir une liberté d’itinéraire qui ne serait pas possible autrement.
Grégoire est né dans les Hautes-Alpes et a passé chaque été de sa jeunesse dans les montagnes autour de Gap. Alors qu’il vit en Bretagne, il découvre les sports d’eau, notamment le kayak et la voile. En retournant dans les Alpes, à Grenoble, pour poursuivre ses études de physique il s’est mis à explorer les massifs alpins majoritairement à pied. Il vit maintenant en Californie et a repris la pratique de la voile tout en continuant à randonner dans les paysages arides californiens. Ce voyage était pour lui l’occasion d’enfin partir en autonomie sur plusieurs semaines et de cumuler ses passions pour la randonnée et les sports d’eau. Rob avait tenté plusieurs fois de l’embarquer dans une de ses aventures, il ne pouvait refuser à chaque fois…
Après plusieurs sorties d’alpinisme dans les alentours de la capitale des Alpes, Rob et Greg ont voyagé pour la première fois ensemble au printemps 2016 lorsqu’ils se sont rendus en Finlande pour traverser la région de Yllas-Pallastunturi en ski de fond.
Cette fois-ci ils ont choisi l’Islande, « un terrain de jeu idéal pour des expéditions telle que celle que nous avons envisagée ».
Pour ce défi, ils ont voulu découvrir les coins les plus reculés d’Islande et se mettre à l’épreuve avec un moyen de locomotion, le packraft, encore peu connu. Le packraft est un petit bateau gonflable conçu pour être facilement transportable dans un sac de randonnée grâce à sa, toute relative, légèreté et son faible encombrement. Ce concept permet de se déplacer plus rapidement en descendant des rivières (même en eaux-vives) sans pour autant devoir porter un bateau lourd et encombrant pendant les phases de marche.
Le choix du matériel
Pour partir du bon pied :
« Avant le départ, nous devions faire le choix du matériel à emporter, ce qui fut un exercice difficile. Habitué à sélectionner des équipements légers, le fait de partir sur deux activités très différentes, ajoutait une nouvelle contrainte. Une de nos principales inquiétudes concernait le choix des chaussures. Nous avions besoin de chaussures suffisamment rigides et cramponnables pour le glacier, tout en restant confortables pour les longues distances. Il était bien entendu, hors de question de prendre deux paires par personne ! Notre choix s’est porté sur les Millet Elevation GTX et elles se sont révélées parfaites pour notre aventure. Après plus de 200 kms de marche et plusieurs glaciers en neige et glace, on valide ! Pour les descentes en packraft, après avoir lu plusieurs comptes-rendus de voyages similaires, notre choix s’est orienté vers des chaussons en néoprène plutôt que de prendre le risque de tout faire en chaussures de randonnée. Après avoir vécu des descentes très mouillées, c’est bien sûr un choix que nous ne regrettons absolument pas ! »
Pour rester connecté :
« Nous avons également dû choisir un système de communication. En raison de l’impossibilité de capter du réseau depuis l’intérieur du pays, et suivant les conseils des services de sécurité, nous avons décidé de nous équiper d’un dispositif GPS pour pouvoir envoyer des messages en cas de besoin. Nous avons choisi un Garmin Inreach Mini, qui permet d’envoyer des messages personnalisables. Ce système, un peu moins fiable que les balises de détresse classiques qui permettent d’envoyer seulement un signal de secours, présente l’avantage d’envoyer des messages, ainsi que la position associée, à plusieurs destinataires par texto ou e-mail. De plus, en configurant correctement le compte Garmin associé à la balise, il est possible de publier l’itinéraire en ligne sur le site associé et ainsi de rassurer les proches restés à la maison. Sa petite taille, plus réduite qu’un téléphone satellite, est aussi un avantage. Bien que nous ne nous en sommes pas énormément servi, car nous sommes restés proches de la côte où le service de téléphonie mobile était suffisant, nous l’avons trouvé très facile à utiliser et il sera à coup sûr dans le sac pour nos prochains voyages. »
L’excursion
« Une fois les préparatifs terminés, le premier jour à Reykjavík nous a permis de peaufiner quelques détails de dernière minute. Notre hôte Fannar, qui connaissait bien le glacier, nous a donné les derniers conseils puis, le 17 septembre, nous sommes partis rejoindre le glacier du Vatnajökull. Le jour de notre départ, les prévisions météorologiques étaient incertaines et elles se sont malheureusement rapidement dégradées. Une grosse perturbation a été annoncée pour le milieu de la semaine pour durer 3-4 jours. En arrivant au pied du glacier, le service de sécurité civile, auprès de qui nous avions déclaré nos intentions, nous a contacté pour annoncer que toutes progressions sur le glacier seraient impossibles et dangereuses pour les prochains jours. Sur place, nous avons rencontré des guides qui nous ont confirmé cet avis. Avant l’arrivée du mauvais temps, nous avons tout de même profité d’une belle journée pour explorer le glacier, mais à notre retour nous avons appris que les prévisions météorologiques s’étaient encore détériorées.
Après une difficile concertation, nous avons décidé de modifier notre itinéraire afin de ne pas perdre une semaine à rester cloués sur place. Sans information sur la quantité de neige attendue, rien ne pouvait nous garantir que le glacier serait praticable une fois la perturbation terminée. Nous avons donc pris l’initiative de faire le tour de l’île avec l’idée de remonter la rivière à pied jusqu’aux hautes terres puis de la redescendre avec nos packrafts et ainsi réaliser une partie de notre projet initial. Nous avons donc rallié notre nouveau point de départ en stop; pendant ce temps la neige est tombée jusqu’au niveau de la mer et certaines routes ont été fermées. En croisant des chasse-neiges sur la route, nous avons eu de sérieux doutes concernant la suite de notre aventure! Nous nous attendions certes à du mauvais temps voire à des orages mais certainement pas à un épisode neigeux aussi sérieux à cette époque de l’année. Quelques jours plus tard, en discutant avec des islandais, nous avons eu la confirmation qu’il s’agissait d’un début d’hiver particulièrement précoce. Par ailleurs, les sites de météorologie ont également souligné un mois de septembre atypique !
Une fois arrivé sur les rives de Skjálfandafljót, à hauteur de Godafoss, la marche vers les hautes terres a commencé. Le mauvais temps a perduré et nous avons subi la pluie puis la neige en gagnant de la hauteur. Cependant, pouvoir enfin avancer par nos propres moyens nous a redonné le moral et nos efforts ont été récompensés par de somptueux paysages. Finalement, en arrivant sur les hauts plateaux, le beau temps s’est installé. Malheureusement, le froid des jours précédents avait considérablement diminué le débit des rivières et nous avons jugé inutile de continuer notre progression plus en amont de Skjálfandafljót. En effet, nous aurions passé plus de temps à porter nos packrafts à la descente qu’à pagayer ce qui nous aurait fait perdre un temps considérable. Les packrafts ont été gonflés à l’abri du vent et c’est avec un certain plaisir que nous avons retiré ce poids de nos épaules et commencé enfin à pagayer. La descente entre les bancs de sables noirs entourés de sommets blanchis par la neige fut une expérience dépaysante ! Les rives défilaient sur nos côtés et nous avons continué à pagayer jusqu’à une cascade qui nous barrait la route, nous obligeant à plier notre matériel et à le remettre sur nos dos pour terminer à pied.
Par la suite, nous avons décidé de rester sur des sorties plus courtes mais de rechercher des rivières plus exigeantes afin de tester nos capacités sur les embarcations et d’explorer la diversité de paysages qu’offre l’Islande. Finalement, ce fut la partie la plus importante de notre périple et nous avons navigué sur plusieurs tronçons de 3 rivières, toujours en combinant marche à pied et descente en packraft. Ayant prévu seulement le matériel pour la traversée et donc du packraft sur des eaux plutôt calmes, les descentes en eaux vives ont été très froides et mouillées !
La première de ces rivières, Fnjoská, est un cours d’eau transparente descendant de la vallée du Bleiksmýrardalur. Vers la fin de son parcours, juste au sud du village de Grenivík, la rivière devient plus encaissée et une petite section de rapides nous a servi de terrain d’apprentissage pendant deux jours. Nous avons été surpris par la stabilité des embarcations et nous avons fait le plein de sensations dans ces rapides. Cette expérience, au-delà de nous faire frôler l’hypothermie, nous aura mis en confiance et nous aura appris à bien contrôler les packrafts en eaux vives. Avant de quitter cette zone, nous avons réalisé une descente d’une dizaine de kilomètres de Fnjoská. Cette descente s’est terminée par la zone de rapides repérée la veille et que nous avons cette fois passé à la tombée de la nuit.
Les rivières suivantes étaient deux rivières de classe III: Vestari-Jökulsá, ou rivière glaciale de l’Ouest, et Hvítá, la rivière blanche. Hors saison, sans personne sur l’eau, nous avons pu découvrir les canyons encaissés des deux rivières, profiter des rapides et même nous offrir une petite chute dans l’eau glacée. Hvítá, en particulier, avec un fort courant nous a réservé quelques moments d’adrénaline et nous avons bien cru finir à l’eau un bon nombre de fois. Mais la stabilité des embarcations gonflables et quelques bons coups de pagaie nous ont permis de finir les descentes.
Vers la fin de notre séjour, nous avons profité des anticyclones pour pouvoir monter sur les glaciers et ainsi découvrir les paysages que nous cherchions lors de notre objectif initial. Nous avons notamment réussi l’ascension de l’Eyjafjallajökull, le fameux volcan dont l’éruption de 2010 avait paralysé l’Europe. Sentiment d’une merveilleuse solitude, uniquement dérangée par le ballet des nuages autour du cratère de glace.
Le bilan, après un début très difficile psychologiquement, en raison de l’abandon de notre projet initial malgré de longs préparatifs, est positif : plus de 270 kms à pied et en packraft le long de plusieurs rivières islandaises. Nous avons pu découvrir des paysages majestueux à pied et sur l’eau tout en apprenant à naviguer en eaux vives, dans des conditions pas toujours faciles. Le fait d’avoir réorganisé notre périple en excursions quotidiennes, nous a permis de faire des descentes plus techniques que ce que nous avions initialement prévu. Bien que nous ayons appris à maîtriser les packrafts dans des conditions différentes et pu profiter des paysages islandais à pied et sur l’eau, notre objectif initial reste toujours un défi à relever pour une prochaine aventure ! »
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